Points de repère
Cette lettre fut écrite au mont Minobu lorsque Nichiren avait cinquante-cinq ans. Son destinataire était Nanjō Shichirō Jirō Tokimitsu, généralement connu sous le nom de Nanjō Tokimitsu, partisan dévoué de Nichiren et vassal du village d’Ueno, dans la région du mont Fuji, dans la province de Suruga.
Dans cette lettre, citant le Sūtra du Lotus, Nichiren dit que ceux qui servent le pratiquant du Sūtra du Lotus à l’époque de la Fin de la Loi, même pendant une courte période, obtiendront des bienfaits incomparablement plus grands que ceux qui servent le bouddha Shakyamuni pendant tout un kalpa. Puisque tous les bouddhas ont reconnu la véracité du Sūtra du Lotus et le fait qu’il ne contient pas la moindre erreur, on ne peut douter que la loyauté de Tokimitsu lui apportera non seulement de grands bienfaits dans son existence présente, comme le promet le Sūtra, mais apportera aussi des bienfaits à son père défunt.
En ce tout début de nouvelle année, votre messager m’a bien transmis vos vœux. Je vous transmets aussi les miens ! Et j’ai bien reçu vos divers cadeaux, notamment les soixante-dix gâteaux de riz, le récipient de saké en bambou, le chargement de taros, le sac en papier d’algues de rivière, les deux gros radis blancs et les sept ignames. Ces articles témoignent de votre grande bienveillance.
Il est dit dans le huitième volume du Sūtra du Lotus: « Leurs souhaits ne seront pas vains et, en cette existence, ils obtiendront des bienfaits en rétribution1. » On y lit également : « Il aura aussi en cette existence une rétribution manifeste2. » Le Grand Maître Tiantai a dit : « Le Fils du Ciel n’a pas proféré un seul mot en vain », et « Les mots du roi du Dharma ne contiennent aucun mensonge3 ». Un dirigeant vertueux ne ment jamais, même si cela doit provoquer sa perte. Cela est d’autant plus vrai pour l’Ainsi-Venu Shakyamuni qui, alors qu’il était le roi Clarté-Universelle dans une existence antérieure, revint au palais du roi Pied-Taché [pour être exécuté] parce qu’il observait le précepte interdisant le mensonge ! Quand il rencontra le roi Kali dans une autre existence passée, il déclara que les gens qui disent rarement la vérité ou profèrent de grands mensonges tomberont en enfer. De plus, pour en revenir au Sūtra du Lotus, le Bouddha y déclare : « L’Honoré du monde [qui depuis longtemps déjà expose des doctrines adaptées à ses auditeurs] doit maintenant révéler la vérité [tout entière]4. » En outre, ce Sūtra fut exposé devant l’assemblée où le bouddha Maints-Trésors et les bouddhas des dix directions s’étaient réunis, comme si le soleil, la lune, et d’innombrables étoiles s’étaient alignés. S’il y a des mensonges dans leSūtra 659du Lotus, en quoi alors les gens peuvent-ils croire ?
Ceux qui offrent ne serait-ce qu’une fleur ou un bâton d’encens à ce Sūtra ont fait des offrandes à cent mille millions de bouddhas dans leurs existences antérieures. Cela est encore plus vrai à l’époque de la Fin de la Loi de l’Ainsi-Venu Shakyamuni, quand le chaos règne, et que le souverain, ses ministres, et les gens ordinaires vouent tous la même haine au pratiquant du Sūtra du Lotus. Quand ce pratiquant est pareil à un poisson dans une flaque d’eau en période de sécheresse, ou comme un cerf encerclé par des gens de toutes sortes, ceux qui lui rendent visite de leur propre initiative obtiendront des bienfaits bien plus grands que ceux qu’ils auraient acquis en faisant des offrandes au bouddha Shakyamuni lui-même, seigneur des enseignements, en pensées, en paroles et en actes pendant toute la durée d’un kalpa. Les paroles d’or de l’Ainsi-Venu sont limpides. Le soleil est brillant et la lune est claire. Les mots du Sūtra du Lotus sont brillants et clairs, clairs et brillants, comme le reflet d’un visage dans un miroir transparent ou l’image de la lune dans l’eau cristalline. Se pourrait-il alors que la déclaration de l’Ainsi-Venu « dans cette existence actuelle, ils obtiendront des bienfaits en rétribution » ou sa proclamation « il aura dans cette existence même une rétribution manifeste » ne soient vides [de sens] que pour Nanjō Shichirō Jirō ? Il est certain que, même s’il pouvait exister une époque où le soleil se levait à l’ouest ou s’il devait venir un temps où la lune émergeait du sol, les paroles du Bouddha ne se révéleraient jamais fausses. De ce point de vue, il ne peut y avoir le moindre doute sur le fait que votre regretté père est maintenant en présence du bouddha Shakyamuni, seigneur des enseignements, et que vous recevrez de grands bienfaits dans votre existence présente. C’est vraiment merveilleux, vraiment splendide !
Nichiren
Le dix-neuvième jour du premier mois de la deuxième année de Kenji [1276]
Réponse à Nanjō
Notes
1. Sūtra du Lotus, chap. 28.
2. Ibid. Le passage complet dit : « Si quelqu’un fait des offrandes [à ceux qui acceptent, gardent, lisent et récitent ce Sūtra] ou dit du bien d’eux, il aura dans cette existence même une rétribution manifeste. »
3. Il s’agit d’une paraphrase de deux passages du Commentaire textuel du Sūtra du Lotus.
4. Sūtra du Lotus, chap. 2.